Politique d'hospitalité Les Grandes Voisines - Etat d'urgence Solidarités

Conseil de Métropole du 13 décembre 2021

Délibération 

N° 2021-0810 : développement solidaire et action sociale – Politique d’hospitalité Les Grandes Voisines – Attribution de subventions à la Fondation de l’armée du salut et au Foyer Notre Dame des sans abri (FNDSA) Attribution de subventions aux associations et structures agissant en faveur de l’accueil et intégration des bénéficiaires d’une protection internationale – Année 2021

Intervention prononcée par Nathalie Perrin-Gilbert pour le groupe Métropole en commun

Mesdames et Messieurs les élu.e.s,

A l’occasion de ce projet de délibération, notre groupe La Métropole en Commun salue la vitalité, l’inventivité, la force du réseau associatif qui agit dans notre métropole. 

Nous saluons la mobilisation de l’Armée du Salut et du Foyer Notre Dame des Sans Abris autour des femmes isolées avec enfants de moins de trois ans, avec un programme d’hébergement, d’accompagnement social, et d’insertion professionnelle. Un programme de remobilisation collective de ces femmes au service de la dignité de chacune. Nous saluons également les villes de Caluire, Francheville et Craponne qui accueillent ces initiatives, conscientes que ces projets sont aussi une opportunité de dynamisation de leur territoire. 

Notre groupe La Métropole en Commun votera bien sûr favorablement ce projet de délibération.

Mais si nous prenons la parole ce soir c’est pour rappeler que notre métropole ne fait toujours pas suffisamment acte d’hospitalité pour les mineurs non accompagnés dont, pourtant, nous avons la responsabilité légale et morale. A tel point que cette responsabilité qui est la nôtre est portée à bout de bras par les collectifs de l’AMIE, du Chemineur, de la CUM par exemple et par des habitantes et habitants qui accueillent des mineurs à leur domicile ou ouvrent des bâtiments vacants. Ces collectifs, ces habitantes et habitants, nous voulons leur rendre hommage ce soir et saluer leur action légitime et juste. 

Mais nous voulons dire aussi que nous ne pouvons évidemment pas nous satisfaire que des citoyennes et citoyens se substituent à notre collectivité ni à l’État qui, plutôt qu’agir de concert, se renvoient régulièrement à leur responsabilité respective.  

A l’occasion de ce projet de délibération qui porte sur notre politique d’hospitalité, nous  prenons la parole ce soir parce que nous sommes entrés, là, dans un réel état d’urgence. 

État d’urgence à nous extraire du martèlement médiatique et à déconstruire un propos qui se diffuse alors qu’il repose sur des bases fausses et sans doute mal vérifiées. Non, nous n’avons pas à faire à des arrivées toujours plus importantes de jeunes sur notre territoire. Nous notons au contraire une stabilité des chiffres depuis l’année 2019 incluse. Nous parlons, bon an mal an, de 1000 jeunes dans une métropole qui compte 1,6 millions d’habitant.es. Non, les Mineurs Non Accompagnés dont nous parlons ne sont pas des délinquants qui menacent la sécurité de nos villes. Peu d’actes de délinquance sont le fait de mineurs que nous plaçons sous notre protection institutionnelle, ni même de mineurs non accompagnés en phase de recours et en attente de passage devant le Juge pour Enfants. La délinquance des mineurs existe mais ce sont d’autres phénomènes, d’autres publics, et il est injuste et faux de faire porter la responsabilité d’actes condamnables aux mineurs qui sollicitent la protection de l’Enfance. 

État d’urgence à revenir au cadre réglementaire prévu pour les évaluations de minorité. Les textes légaux prévoient une évaluation faite par une équipe professionnelle et pluridisciplinaire durant une mise à l’abri d’une durée minimale de 5 jours des jeunes évalués. Après une période d’amélioration, de nouveau la situation s’est dégradée et, de nouveau, nous sommes hors cadre réglementaire avec une évaluation de minorité qui se fait durant une mise à l’abri n’excédant parfois pas 48 heures. Pourtant l’État finance 5 jours de mise à l’abri. Sans surprise, notre groupe La Métropole en Commun demande le retour à une mise à l’abri d’une durée minimale de 5 jours qui permette une évaluation de minorité digne de ce nom. 

A ce sujet, la dégradation des conditions de l’évaluation de minorité se lit dans les lettres de refus émises par la Métropole. Des lettres de refus de plus en plus nombreuses ; des lettres qui se ressemblent toutes sans aucune référence à des éléments précis du récit de vie du jeune dont la minorité est évaluée ; des lettres qui s’appuient quasi uniquement sur le critère de l’apparence physique du jeune pour justifier d’un refus de prise en charge. On ne peut dire à un jeune qu’il est majeur parce que soi-disant trop grand, ou trop musclé ou parce que ses traits sont marqués. Nous demandons que cette motivation indigente et violente de l’apparence physique disparaisse définitivement des courriers de la Métropole car ce critère n’est ni digne, ni suffisant, ni fiable. 

État d’urgence enfin, à héberger les jeunes qui font appel du refus de prise en charge de la métropole et qui entrent dans une procédure de recours.  Pourquoi ? 

D’abord, pour des raisons humanitaires et sanitaires en cette période de l’année. On ne peut laisser un jeune, qui sollicite la protection de l’enfance, en errance dans la rue par le froid et dans un contexte de reprise pandémique. Il s’agit d’une question de santé publique. Nous vous demandons donc de revenir à l’hébergement inconditionnel de ces jeunes pendant cette période hivernale ainsi que vous l’aviez fait l’an passé. Nous vous demandons aussi de soutenir les collectifs citoyens qui accompagnent ces jeunes au  « Chemineur » sur Lyon 4e ou « chez Gemma » sur Lyon 1er. Ces lieux doivent pouvoir notamment bénéficier de l’accès à l’eau courante, à l’électricité et au chauffage. 

Ensuite, parce que nous observons -et c’est à mettre en regard des conditions d’évaluation dont je viens de parler précédemment, que les juges pour enfants sont de plus en plus souvent amenés à contredire les décisions de rejet de la métropole et à ordonner une prise en charge au titre de l’Aide Sociale à l’Enfance. Or, entre le moment du rejet par la Métropole et le moment du jugement en recours, il aura pu se dérouler trois mois durant lequel le jeune aura connu la rue. Il en sortira un peu plus fragilisé, maltraité, abîmé. Et sa prise en charge sera d’autant plus complexe et coûteuse pour notre collectivité. 

Médecins Sans Frontière et le Comede viennent de publier un rapport sur la santé mentale des mineurs non accompagnés en situation de recours. Les deux organisations indiquent : « alors qu’une réponse en santé mentale devrait leur être apportée, le parcours des MNA pour accéder aux soins est semé d’embûches ». Elles relèvent que « les conditions d’accueil des mineurs non accompagnés au cours de la procédure en reconnaissance de minorité majorent les troubles psychiques préexistants de ces jeunes tout en favorisant l’apparition de nouveaux troubles ». En clair, nous devons arrêter d’ajouter de la souffrance et de la violence là où il y en a eu que trop. 

En conséquence, le groupe la Métropole en Commun demande que les situations de mise à la rue et d’errance soient évitées pour les MNA en situation de recours. Pour cela nous demandons que l’expérience réussie de la Station soit, non seulement poursuivie, mais également amplifiée et nous demandons l’ouverture de 2 autres stations ce qui porterait à 150 le nombre de places d’accueil pour ces mineurs en cours de procédure de reconnaissance de minorité. Ne nous y trompons pas quant au coût de cette demande. Son coût financier sera inférieur au coût social, humain et sanitaire de la situation actuelle. 

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les élu.es, les mineurs non accompagnés existent et ils sont là. Ils sont notre affaire. Il s’agit de notre responsabilité d’élu.es d’une métropole qui est attractive pour tous et qui a, au passage, absorbé les compétences sociales du Département. Il s’agit aussi de notre crédibilité quand nous avons sous les yeux un projet de délibération qui nous décrit comme une métropole accueillante et hospitalière, soucieuse des plus vulnérables. 

Je vous remercie de votre attention.

Groupe Métropole en commun

20 rue du lac

69003 Lyon


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